La Femme de Tchaïkovski

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[Cinéma] – VOST (RU) – De Kirill Serebrennikov

Avec Odin Lund Biron, Alyona Mikhailova, Filipp Avdeyev
2h 23min / Drame, Biopic

Synopsis et critique : Télérama

La Femme de Tchaïkovski est une œuvre au noir, terrible et splendide, une leçon de ténèbres, en même temps que la révélation d’une histoire méconnue : l’amour fou et non partagé qu’éprouva Antonina Tchaïkovski pour son mari pendant des décennies, de leur première rencontre jusqu’à la mort de l’illustre compositeur, et même au-delà.

C’est un peu comme si l’homme aimé religieusement, fanatiquement par l’Adèle H. de François Truffaut (et fille de Victor Hugo), presque à la même époque – la fin du xixe siècle -, avait été non seulement indifférent mais homosexuel. Le génie ombrageux de la musique, dans la force de l’âge, ne répond à la déclaration d’amour épistolaire de la jeune femme modeste que dans le but de contracter un mariage de façade. S’ensuit pour elle un enfer de frustration, d’humiliation, d’aveuglement, de déni.
Serebrennikov, ouvertement gay, endosse avec frénésie le point de vue de la suppliciée. Il met sa virtuosité tourbillonnante, sa démesure fantasmatique au service de cette chute, qui est aussi une résistance. Antonina est méprisée en tant que femme dans une époque et une société patriarcales (milieu artistique compris), un monde d’hommes, homosexuels ou non. Elle est rejetée en tant qu’épouse. Et tenue pour quantité négligeable, compte tenu de ses origines sociales. Mais sa puissance tient à la force de son désir pour Tchaïkovski. Un désir tout sauf éthéré, nourri d’admiration mais violemment sexuel, et qui tend vers l’infini au fur et à mesure que le compositeur se dérobe, puis cherche à se débarrasser de sa femme.

Par son ampleur tragique, et l’énigme de cette vie à la fois gâchée et embrasée, le film esquisse une métaphysique de la passion amoureuse, laissant en suspens une question taraudante : Antonina (extraordinaire Alyona Mikhailova) aurait-elle brûlé d’un tel feu si Tchaïkovski ne l’avait pas repoussée d’emblée et toujours, et s’il lui avait rendu ne serait-ce qu’un seul baiser ?

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