VF – De Nils Tavernier
Avec Guillaume Gallienne, Violette Guillon, Adeline D’Hermy
26 février 2025 en salle | 1h 31min | Drame, Historique
Synopsis et critique Utopia :
Depuis près de 30 ans, Nils Tavernier (fils de Bertrand) a construit une filmographie discrète et sensible à travers de nombreux documentaires et quelques plus rares films de fiction. Avec toujours cette même volonté de placer l’humain au cœur de son propos, il a souvent mis la lumière sur des parcours de vie authentiques et singuliers, évoquant des univers très différents : la justice, la maladie mentale, la réinsertion, la danse… En racontant l’histoire de Tauba Zylbersztejn, avec l’aide au scénario de Guy Birenbaum (petit-fils de celle-ci mais aussi journaliste, écrivain et éditeur), il signe ici un film poignant qui mêle l’intime et l’historique avec justesse et intelligence.
La Vie devant moi se déroule presque exclusivement dans la chambre de bonne où Tauba et sa famille ont donc vécu durant deux années, mais ce huis-clos qui pourrait être oppressant est entrecoupé de nombreuses images d’archives et c’est vraiment la très bonne idée du film : grâce à ce procédé, il raconte en hors-champs les grands évènements de la période, de la rafle du Vél d’Hiv à la libération de Paris, et apporte à son film l’envergure historique et pédagogique que son sujet requiert. Ces images, saisissantes donnent une dimension particulière à l’œuvre de fiction, à travers les visages anonymes des victimes et des bourreaux, des vaincus, des vainqueurs, des témoins, des complices… Le film commence d’ailleurs par le témoignage de Tauba et se termine par celui de son époux, Robert Birenbaum, engagé dans la résistance à 16 ans et l’un des derniers résistants encore en vie (98 ans).
Échappant de justesse à la rafle du Vél d’Hiv, Tauba et sa famille vont être hébergées au 209 rue Saint-Maur, dans une chambre de bonne prêtée par des voisins bienveillants que l’on n’appelait pas encore des « justes ». Jeune fille vive et radieuse, sans doute encore préservée du climat poisseux et anxiogène qui s’est installé dans la capitale, Tauba va devoir se résigner à ne plus sortir, à ne plus jouer du piano et à voir s’écouler lentement le fil des jours, des semaines, des mois, des saisons… dans cette prison refuge. C’est par les récits de sa meilleure amie, qui vient la visiter secrètement, de sa grand-mère et de la propriétaire du logement que l’on perçoit l’horreur de l’occupation nazie, comme une rumeur maligne qui gagne du terrain : les arrestations, les convois, les départs vers des lieux inconnus et les confiscations de biens. Mais il y a aussi, comme une lueur d’espérance, l’écho des actions de la résistance.
Dans ce silence terrible où le moindre faux pas peut être fatal, la famille va devoir apprendre à tuer le temps, uniquement reliée à l’extérieur par un œil de bœuf depuis lequel il ne faut surtout pas se faire voir et qui laisse filtrer des rayons de soleil, des bouts de ciel et le bruit des pas dans la cour. La famille survit, entre lassitude, angoisse, découragement et petites étincelles de joies et de bonheurs partagés. Pourtant Tauba, tout comme Anne Franck, continue de rêver, d’espérer et de croire que sa vie est devant elle…