VF – De Enya Baroux
Avec Hélène Vincent, Pierre Lottin, David Ayala
12 mars 2025 en salle | 1h 37min | Comédie dramatique
Synopsis et critique : Utopia
Marie (Hélène Vincent), 80 ans, vit seule chez elle dans sa maison et peine à accomplir les tâches les plus simples du quotidien. Un cancer, dont elle s’était débarrassée quelques années plus tôt, refait surface. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Marie n’en peut plus des souffrances et de cette vie rétrécie. Elle a décidé de recourir au suicide assisté en Suisse, mais elle ne parvient pas à annoncer cette décision à son fils complètement immature et irresponsable, et à Anna, sa petite fille.
Rudy est un auxiliaire de vie instable, qui profite parfois des personnes âgées pour se dépatouiller de ses déboires, mais leur est totalement dévoué. Alors qu’il est venu dépanner Marie, coincée sur son monte-escalier électrique en panne, il se trouve de fil en aiguille au volant d’un camping-car en route pour la Suisse, avec à son bord la vieille dame, son fils, sa petite fille, et un rat domestique nommé Lennon…
Sujet d’actualité sensible, la question de la fin de vie et du droit à mourir dans la dignité est abordée ici dans le registre inattendu de la comédie – avec un soupçon de mélodrame quand même. La douleur, la solitude, la dépendance, la honte, la place des enfants, des familles dans ce processus… Le film aborde toutes ces questions sans tabou, ni dogmatisme, avec en toile de fond un regard aiguisé sur la place des plus vulnérables dans la société, qu’ils soient âgés et malades, comme Marie, ou bien perdus et noyés dans les difficultés financières, comme Rudy ou David. Entre Marie, l’octogénaire frondeuse, et Rudy, le marginal solitaire accompagné de son inséparable rongeur, le courant passe bien. Pareil avec l’ado, Rudy a le truc pour détendre l’atmosphère. Cash, sans filtre et à l’écoute, il devient rapidement le perturbateur et le médiateur de cette famille qui ne brille pas par sa capacité à communiquer et à laquelle il est étranger. Auxiliaire de vie, il devient un « auxiliaire de mort épatant », lui dira Marie, reconnaissante.
Hélène Vincent, dans un rôle proche de celui qu’elle tenait (dans un registre beaucoup plus dramatique) dans Quelques heures de printemps de Stéphane Brizé, apporte cette fois une solide touche d’humour à ce personnage de vieille dame facétieuse et courageuse. Lumineuse, elle fait rayonner tous les comédiens qui l’entourent. Pierre Lottin, avec qui elle partageait déjà l’affiche de Quand vient l’automne (François Ozon), excelle dans le personnage un peu paumé de Rudy, qui se révèle au fil de l’histoire être le héros qui sort grandi d’une aventure qu’il n’a pas choisie. David Ayala, vu récemment dans Miséricorde d’Alain Guiraudie, campe un fils immature extrêmement attachant. Et enfin, Juliette Gasquet crève l’écran dans le rôle de l’ado, le personnage jeune mais pas le moins mature de cette rocambolesque épopée. Avec des quiproquos et des dialogues savoureux, le scénario alterne dans un bon dosage l’émotion et le rire. Avec ce premier long-métrage très réussi, Enya Baroux parvient à faire advenir ce petit miracle de nous faire rire avec la mort, grâce à une histoire qui ne parle que de la vie. On ira est un petit bijou de comédie qui touche au cœur.