Le garçon et le héron

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VF – A partir de 10 ans – De Hayao Miyazaki

2h 04min / Animation, Drame, Aventure

Synopsis et critique : Utopia

Au cinéma, peu de noms finalement sont aussi emblématiques que celui de Hayao Miyazaki, fondateur du célèbre Studio Ghibli avec le regretté Isao Takahata. Ses œuvres, qui nous ont fait vivre des rêves éveillés comme nulle autre n’a su le faire, l’ont hissé au rang de quasi-légende vivante, il est considéré par beaucoup comme l’artiste le plus visionnaire de l’animation. On imagine donc combien l’annonce d’un nouveau film, alors que le cinéaste de 82 ans avait annoncé sa retraite après Le Vent se lève (2013), a pu être source de liesse pour tous les amoureux de son cinéma, pour tous les amoureux DU cinéma.

Tout commence par une scène à couper le souffle, probablement l’une des séquences les plus déchirantes et magnifiquement animées de l’histoire de Ghibli. Mahito court à toute allure à travers le chant des sirènes et les étincelles flottantes, ses pieds d’enfant survolent le désastre causé par un bombardement. Les contours de son visage, minutieusement dessinés à la main, se brouillent par instants, suggérant une fournaise qui contorsionne l’image dans son mirage irradiant. Cette animation virtuose ne nous montre pas seulement le feu, elle nous fait ressentir sa chaleur, annonçant la manière dont Mahito affrontera son traumatisme – la perte de sa mère. Même s’il n’est pas témoin de sa mort, il l’imaginera d’une manière à la fois terrible et belle – non pas comme si elle brûlait, mais comme si elle devenait les flammes.
Quelques années plus tard, Mahito s’installe dans un vaste domaine à la campagne. Non loin de l’usine d’avions de guerre dirigée par son père, qui vient de se remarier avec son ex-belle-sœur. Malgré toute la bienveillance de cette dernière, Mahito a du mal à prendre ses marques. Son chagrin l’empêche même d’apprécier l’escadron de mamies génialement espiègles qui l’accueillent et tentent de rendre son quotidien plus joyeux ! Fasciné par un étrange héron qui rôde autour de sa nouvelle maison, il finira par le suivre jusqu’à une étrange tour abandonnée… qui deviendra le portail vers un monde merveilleux, luxuriant et alternatif – comme seul Miyazaki sait en créer –, dans lequel il trouvera le moyen de renouer avec sa mère disparue.

Difficile – et inutile – de vous en dire plus, tant le récit devient vaste et palpitant, prend une ampleur épique, ouvrant des perspectives vertigineuses, avec des imbrications et interprétations multiples. Disons seulement qu’il s’agit de l’univers d’un réalisateur au sommet de son art, à l’imagination visuelle et narrative illimitée. Entre évidence et impénétrabilité comme le sont la plupart des rêves, Le Garçon et le héron est une des plus extraordinaires constructions de l’œuvre de Miyazaki, par laquelle on sent qu’on peut entrer et sortir par des milliers de portes, fusionnant la matière de tous ses précédents films, dont l’insurpassable musique de Joe Hisaishi. Et pour celles et ceux qui se languissent des esprits de la forêt de Mononoké… vous ne serez pas en reste avec les warawara, entités adorables et moelleuses incarnant l’âme humaine !
Le nouveau chef-d’œuvre de Miyazaki, immense spectacle visuel où chaque plan est une merveille, est peut-être l’adieu onirique d’un artiste immortel se préparant pourtant à la mort. Il y aborde les thèmes qui lui sont chers (le rapport au vivant, à la nature, à la création, à la vie, à la mort justement) sous un angle nouveau, avec le sentiment d’urgence de celui qui sait que c’est peut-être la dernière fois… C’est absolument magnifique. Et bouleversant.

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