Quand tu seras grand

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[Cinéma] – De Andréa Bescond, Eric Métayer

Avec Vincent Macaigne, Aïssa Maïga, Evelyne Istria
1h 39min / Comédie dramatique

Synopsis et critique : Utopia

Après le très marquant Les Chatouilles, le couple Andréa Bescond / Éric Métayer revient avec ce Quand tu seras grand plus léger en apparence, qui prend les atours d’une comédie un brin outrée et loufoque pour mieux aborder quelques thèmes essentiels et nous plonger dans les méandres d’un de ces lieux qui se trimballent une telle réputation qu’on ferait tout pour les éviter : un Ephad. Pourtant cet Ehpad-là n’a rien de sinistre et même, côté résidents, comme le susurre la chanson, « il y a de l’amour dans l’air » : il faut voir avec quelle tendresse infinie Yvon lutine sa Gigi. Contrairement à leurs corps, leurs baisers n’ont jamais vieilli. Ce sont deux paires d’yeux qui pétillent ensemble, deux cœurs qui palpitent à l’unisson, deux cerveaux qui se tiennent par la main. Toute une vie à cheminer ensemble, à apprendre à se comprendre d’un regard, à accepter les limites de l’autre. Rien que pour eux, leur joie et leur bienveillance communicatives, pour l’interprétation admirable des deux acteurs (Evelyne Istria et Christian Sinninger), Quand tu seras grand vaut carrément le coup d’être vu. Quand on rencontre une Gigi et un Yvon, on ne les oublie pas !

Bien sûr leurs compagnons de route ne sont pas tous logés à la même enseigne. Dans ce royaume sans roi, il y a ceux que l’on oublie et ceux qui s’oublient eux-mêmes. Qu’ils soient « résidents » ou soignants. Si à ces derniers il arrive des choses inénarrables, ils font tourner le moulin, vaille que vaille, serviables, l’entrain chevillé au corps, malgré les heures de fatigue accumulée, le manque de visibilité, de moyens, de reconnaissance. Témoins et victimes d’un système de soins bientôt plus malade que ses patients. Il y a une élégance folle dans leur façon de garder la tête haute, d’assumer failles et sentiments contradictoires, avec moult doses de recul, d’humour et de café pour tenir le choc. Petit personnel – très majoritairement féminin – au bord de la crise de nerfs, qui se défoule à ses minutes perdues, pour reprendre une bonne goulée d’air frais salvateur.
Parmi ces investies, ces passionnés de la première heure, il y a Yannick (Vincent Macaigne) qui s’active en tous sens avec son éternelle jovialité en bandoulière, prompt, pour remonter le moral des troupes, à dégainer une salve d’humour. Mais son humour, il semble définitivement le perdre à l’arrivée d’Aude (Aïssa Maïga) et de sa troupe de mômes bruyants : faute de cantine digne de ce nom, la mairie a décidé d’ouvrir le réfectoire de l’Ehpad aux élèves de l’école communale ! Mais la salle à manger de l’établissement n’est a priori pas faite pour accueillir ces nouveaux invités forcément remuants, peu respectueux des cheveux gris, peu habitués à les cotoyer. Dans le fond, notre société nous parque soigneusement dans des cases bien séparées : les actifs avec les actifs, les retraités avec les retraités, les jeunes avec les jeunes, les vieux avec les vieux, chacun chez soi derrière d’invisibles frontières hermétiques et les brebis seront bien gardées !

Le film montre donc le choc de deux mondes qui s’ignoraient et se trouvent, bon gré mal gré, contraints de cohabiter, dans une ambiance d’abord électrique, voire conflictuelle… Deux mondes qui vont donc s’affronter, puis s’apprivoiser… Ce sera forcément drôle, un chouïa caricatural pour les besoins de la comédie, mais surtout chaleureux et finalement bouleversant. Sans crier gare, le récit partira en vrille et notre cœur avec, comme celui du petit anti-héros de l’histoire, le jeune Brieuc, un attachiant de môme, un parmi tant d’autres que la vie semble avoir gâté mais auquel il manque pourtant quelque chose d’essentiel, qu’il trouvera peut-être là où il ne l’attendait vraiment pas.

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